Héritiers... reproduction ?
Quatre ans avant Mai 68, une gageure. Pierre Bourdieu met les pieds dans le plat en osant publier son étude sociologique sur les étudiants et la culture, Les Héritiers. Il y démontre les liens existant clairement entre niveau social et culturel des parents et accès à l'enseignement supérieur. On y voit également cette distance affichée par les étudiants aisés vis-à-vis de l'enseignement qu'ils reçoivent et de leur propre perception du monde et de la chose culturelle. Distance encouragée par les professeurs ayant une certaine propension à valoriser les élèves ayant une attitude désintéressée par rapport à ce qu'on leur inculque. Une attitude née de leur grande maîtrise de l'appropriation des connaissances. Maîtrise venant pour la plupart d'un héritage social et culturel. Bourdieu écrit sans fioriture. Mais avec une rigueur et une volonté scientifique qui ne quitteront jamais ce futur titulaire de la chaire de sociologie au Collège de France. Quatre ans plus tard, on voit surgir dans la rue, au grand jour, les malaises qu'il pointait du doigt. Mais Bourdieu est déjà ailleurs, il prépare déjà son futur monument, La misère du monde.
D'aucuns pourront dire que les choses ont changé depuis. Que les jeunes ne sont plus autant politisés qu'avant. Que l'accès à l'enseignement supérieur s'est démocratisé. Que dorénavant tout un chacun est libre de poursuivre des études. Mais à bien y regarder, non. Définitivement non.
Les enquêtes menées chaque année par les grandes écoles concernant les CSP (catégories socioprofessionnelles) des parents d'élèves sont en effet révélatrices. On y découvre par exemple que 63% des enfants des cadres et professions intellectuelles supérieures (CPIS) font ou ont fait une grande école, alors que le chiffre est seulement de 18% dans la population (voir à ce sujet l'excellent rapport de l'Insee concernant l'évolution à travers le temps des chances d'accès aux grandes écoles).
Mais une chose aura changé depuis 1964. Le lien entre niveau social et niveau culturel n'est plus aussi évident. Le symbole de la richesse était avant la bibliothèque. C'est maintenant le téléviseur plasma 180cm permettant de profiter pleinement du dernier dvd de Christophe Lambert. D'où une certaine déception lorsque l'on se penche sur les centres d'intérêt de nos futures élites. Dont je fais peut-être partie, rassurez-vous.
Tu seras ingénieur, mon fils.
Les Héritiers, Pierre Bourdieu. Editions de Minuit. 192p. , 11.90?
D'aucuns pourront dire que les choses ont changé depuis. Que les jeunes ne sont plus autant politisés qu'avant. Que l'accès à l'enseignement supérieur s'est démocratisé. Que dorénavant tout un chacun est libre de poursuivre des études. Mais à bien y regarder, non. Définitivement non.
Les enquêtes menées chaque année par les grandes écoles concernant les CSP (catégories socioprofessionnelles) des parents d'élèves sont en effet révélatrices. On y découvre par exemple que 63% des enfants des cadres et professions intellectuelles supérieures (CPIS) font ou ont fait une grande école, alors que le chiffre est seulement de 18% dans la population (voir à ce sujet l'excellent rapport de l'Insee concernant l'évolution à travers le temps des chances d'accès aux grandes écoles).
Mais une chose aura changé depuis 1964. Le lien entre niveau social et niveau culturel n'est plus aussi évident. Le symbole de la richesse était avant la bibliothèque. C'est maintenant le téléviseur plasma 180cm permettant de profiter pleinement du dernier dvd de Christophe Lambert. D'où une certaine déception lorsque l'on se penche sur les centres d'intérêt de nos futures élites. Dont je fais peut-être partie, rassurez-vous.
Tu seras ingénieur, mon fils.
Les Héritiers, Pierre Bourdieu. Editions de Minuit. 192p. , 11.90?