free web stats
Carte postale suédoise: Aphorismes.

15 septembre 2008

Aphorismes.

Sphynge
Une des deux Sphynges à l'entrée du château de Chantilly. Elles aussi aiment les phrases énigmatiques.

Comme le rappelait si justement Kyo dans Je saigne encore, "ce qui ne tue pas nous rend plus fort". Vaste problème.

C'est dans Crépuscule des idoles, ou Comment philosopher à coups de marteau (Götzen-Dämmerung oder wie man mit dem Hammer philosophiert) que Nietzsche emploie pour la première fois cet aphorisme. Mais c'est là que ça se complique. La première édition dit "Aus der Kriegsschule des Lebens - Was mich nicht umbringt, macht mich härter" - "Appris à l’Ecole de Guerre de la vie : ce qui ne me tue pas me rend plus dur".

Härter
, et non stärker ("plus fort").

Remplacé par la suite par "ce qui ne me tue pas me rend plus fort". Et enfin, Ecco Homo et son fragment intitulé "Warum ich so weise bin" ("Pourquoi je suis si sage") enfoncent le clou. "Er errät Heilmittel gegen Schädigungen, er nützt schlimme Zufälle zu seinem Vorteil aus; was ihn nicht umbringt, macht ihn stärker" - "Il devine le remède contre ce qui lui nuit ; il fait tourner la mauvaise fortune à son profit ; tout ce qui ne le tue pas le rend plus fort".

Sans doute un peu éculée par les trop nombreuses utilisations et les surinterprétations qui ont pu en être faites. Invitation au status quo (les mauvaises passes de la vie rendent plus fort, renforcent dans ses certitudes et n'invitent pas à changer) ou au sadisme (si le mal rend plus fort, alors autant le provoquer).

Perception très nietzschéenne qui a poussé à assimiler le "dur" au "fort", à penser que plus on est intransigeant, moins on plie, moins on est sensible, et plus on est fort. Cette épaisse carapace qui protège, mais isole en même temps, et empêche de rebondir et de changer.

Je ne crois pas que 2008 m'ait rendu plus fort. Mais plus dur, sans doute, oui.




Question bonus : la crise financière, si elle ne tue pas les banques d'investissement, va-t-elle les rendre plus fortes ?