6ème franchissement de Rouen, le pont des soupirs.
Après avoir regardé les interviews facétieuses de Pivot et constaté la culture extraordinaire de certains lors de la dernière émission de "Double-je", je fais une petite incartade architecturale de fin de soirée.
La circulation automobile dans Rouen a toujours été, comme dans de nombreuses autres villes de France, un problème. Sauf qu'à Rouen, les têtes pensantes qui président aux affaires de la ville se sont toujours évertués à faire en sorte que la capitale normande parte avec un sérieux handicap.
Revenons un peu en arrière, au milieu des années 70. Les grandes villes, croulant sous la circulation automobile, commencent à se doter d'un nouvel outil urbain, le périphérique (Paris se dote du sien en 1973). Cahin-caha, de nombreuses villes suivent le mouvement : les automobiles n'ayant rien à faire en ville doivent la contourner. Toutes ? Non.
Jean Lecanuet ("Lecaca" pour les intimes), maire de Rouen de 1968 jusqu'à sa mort, en 1993, a toujours été terriblement influencé par les commerçants du centre-ville qui craignaient qu'un périphérique ne plombe le commerce local. Il est en effet bien connu que ce sont les chauffeurs routiers qui font Paris - Le Havre qui s'arrêtent pour acheter des croissants ou regarder les vitrines des magasins de vêtements. Alors la ville, en lieu et place d'un périphérique, s'est dotée de voies rapides sur les quais de la Seine. Les commerçants ont ainsi pu admirer les camions s'arrêter aux feux rouges au pied de la cathédrale.
Plus soucieux de monter à la capitale pour satisfaire son destin national (notre sénateur-maire a toujours été la fierté de ses habitants qui ne se sont toujours pas remis du ballottage De Gaulle - Mitterrand de 1965 et de son passage au ministère de la justice), Lecanuet ne voit pas que sa ville s'embourbe. Et, quand on constate que la situation de 2000 n'est plus celle de 1960, il est trop tard. Alors on pallie tant bien que mal les excès de la circulation en concevant des itinéraires de contournement.
La pile de gauche (sud) atteint environ 70 mètres aujourd'hui (l'ouvrage devrait culminer à 88 mètres de hauteur). Le pont se situe à l'extrémité ouest de la ville, au niveau du site qui accueille tous les 5 ans la fameuse Armada (rassemblement de grands voiliers dont la prochaine édition aura lieu du 5 au 14 juillet 2008). Les observateurs auront remarqué qu'en Normandie, au mois de janvier, le soleil est parfois radieux.
Construire un pont, c'est toujours un défi. C'est bien le cas ici. Rouen, premier port céréalier d'Europe, vit sur la Seine. Et doit donc, en aval de la ville et de ses ponts "à bateaux-mouches et à péniches", permettre aux grands bateaux (cargos, bateaux de croisière et grands voiliers) de remonter encore un peu la Seine. Un tunnel ? Trop cher.
Voilà donc l'idée d'un pont levant, avec deux tabliers de 86 mètres de longueur, tenus par des câbles d'acier. Une solution originale dessinée par l'un des architectes du Stade de France, Aymeric Zublena. Une prouesse technique. Et la naissance d'une identité visuelle pour la ville. C'est un peu notre Viaduc de Millau, somme tout. Un peu moins cher, toutefois (60 millions d'euros).
Le pont vu de l'ouest, tout au bout de la ville. Dans le fond on aperçoit la cathédrale Notre-Dame et sa flèche de 151 mètres de hauteur. En remontant le fleuve on tombe sur les écluses de Poses puis Paris.
En attendant, il n'a toujours pas de nom, ce pont, alors que sa mise en service aura lieu dans moins d'un an. Dans la tradition de baptême des autres ponts de la ville, il devrait logiquement prendre le nom d'une célébrité liée à Rouen ou à la Normandie (nous avons déjà les ponts Mathilde, Corneille, Boieldieu, Jeanne d'Arc et Guillaume le Conquérant). Autant dire que Guy de Maupassant et Gustave Flaubert sont sur les rangs. Un autre nom tient la corde, celui de Verrazano. Giovanni da Verrazzano (francisé en "Jean de Verrazane") était un navigateur italien mandaté par François Ier pour explorer les côtes d'Amérique. Ayant établi sa base à Rouen (deuxième ville du royaume de France jusqu'au XVIIIème siècle), il a découvert le site de la ville de New-York en 1524. Un magnifique pont dans la baie de la grosse pomme porte d'ailleurs son nom. Le clin d'oeil serait plutôt amusant, même si les deux noms précédemment cités me plaisent également. L'important est que l'ont échappe aux noms "passe-partout" qui fleurissent un peu trop souvent à Rouen (type "pont de la liberté" ou "pont de la démocratie"). Les esprits facétieux pourront m'envoyer leurs suggestions, on a déjà proposé "pont Pidou" ou "pont des chéris".
Sinon, tant que j'en suis à parler de ma ville, je tiens à dire que cette année, à côté du 250ème anniversaire de la naissance de W.A. Mozart, on célèbre également le 400ème anniversaire de la naissance de Pierre Corneille, né dans une jolie maison à colombages, rue de la Pie à Rouen. L'occasion de faire un billet sur ce dramaturge qui, à l'image de Racine, tombe peu à peu dans les oubliettes des programmes scolaires.
La circulation automobile dans Rouen a toujours été, comme dans de nombreuses autres villes de France, un problème. Sauf qu'à Rouen, les têtes pensantes qui président aux affaires de la ville se sont toujours évertués à faire en sorte que la capitale normande parte avec un sérieux handicap.
Revenons un peu en arrière, au milieu des années 70. Les grandes villes, croulant sous la circulation automobile, commencent à se doter d'un nouvel outil urbain, le périphérique (Paris se dote du sien en 1973). Cahin-caha, de nombreuses villes suivent le mouvement : les automobiles n'ayant rien à faire en ville doivent la contourner. Toutes ? Non.
Jean Lecanuet ("Lecaca" pour les intimes), maire de Rouen de 1968 jusqu'à sa mort, en 1993, a toujours été terriblement influencé par les commerçants du centre-ville qui craignaient qu'un périphérique ne plombe le commerce local. Il est en effet bien connu que ce sont les chauffeurs routiers qui font Paris - Le Havre qui s'arrêtent pour acheter des croissants ou regarder les vitrines des magasins de vêtements. Alors la ville, en lieu et place d'un périphérique, s'est dotée de voies rapides sur les quais de la Seine. Les commerçants ont ainsi pu admirer les camions s'arrêter aux feux rouges au pied de la cathédrale.
Plus soucieux de monter à la capitale pour satisfaire son destin national (notre sénateur-maire a toujours été la fierté de ses habitants qui ne se sont toujours pas remis du ballottage De Gaulle - Mitterrand de 1965 et de son passage au ministère de la justice), Lecanuet ne voit pas que sa ville s'embourbe. Et, quand on constate que la situation de 2000 n'est plus celle de 1960, il est trop tard. Alors on pallie tant bien que mal les excès de la circulation en concevant des itinéraires de contournement.
La pile de gauche (sud) atteint environ 70 mètres aujourd'hui (l'ouvrage devrait culminer à 88 mètres de hauteur). Le pont se situe à l'extrémité ouest de la ville, au niveau du site qui accueille tous les 5 ans la fameuse Armada (rassemblement de grands voiliers dont la prochaine édition aura lieu du 5 au 14 juillet 2008). Les observateurs auront remarqué qu'en Normandie, au mois de janvier, le soleil est parfois radieux.
Construire un pont, c'est toujours un défi. C'est bien le cas ici. Rouen, premier port céréalier d'Europe, vit sur la Seine. Et doit donc, en aval de la ville et de ses ponts "à bateaux-mouches et à péniches", permettre aux grands bateaux (cargos, bateaux de croisière et grands voiliers) de remonter encore un peu la Seine. Un tunnel ? Trop cher.
Voilà donc l'idée d'un pont levant, avec deux tabliers de 86 mètres de longueur, tenus par des câbles d'acier. Une solution originale dessinée par l'un des architectes du Stade de France, Aymeric Zublena. Une prouesse technique. Et la naissance d'une identité visuelle pour la ville. C'est un peu notre Viaduc de Millau, somme tout. Un peu moins cher, toutefois (60 millions d'euros).
Le pont vu de l'ouest, tout au bout de la ville. Dans le fond on aperçoit la cathédrale Notre-Dame et sa flèche de 151 mètres de hauteur. En remontant le fleuve on tombe sur les écluses de Poses puis Paris.
En attendant, il n'a toujours pas de nom, ce pont, alors que sa mise en service aura lieu dans moins d'un an. Dans la tradition de baptême des autres ponts de la ville, il devrait logiquement prendre le nom d'une célébrité liée à Rouen ou à la Normandie (nous avons déjà les ponts Mathilde, Corneille, Boieldieu, Jeanne d'Arc et Guillaume le Conquérant). Autant dire que Guy de Maupassant et Gustave Flaubert sont sur les rangs. Un autre nom tient la corde, celui de Verrazano. Giovanni da Verrazzano (francisé en "Jean de Verrazane") était un navigateur italien mandaté par François Ier pour explorer les côtes d'Amérique. Ayant établi sa base à Rouen (deuxième ville du royaume de France jusqu'au XVIIIème siècle), il a découvert le site de la ville de New-York en 1524. Un magnifique pont dans la baie de la grosse pomme porte d'ailleurs son nom. Le clin d'oeil serait plutôt amusant, même si les deux noms précédemment cités me plaisent également. L'important est que l'ont échappe aux noms "passe-partout" qui fleurissent un peu trop souvent à Rouen (type "pont de la liberté" ou "pont de la démocratie"). Les esprits facétieux pourront m'envoyer leurs suggestions, on a déjà proposé "pont Pidou" ou "pont des chéris".
Sinon, tant que j'en suis à parler de ma ville, je tiens à dire que cette année, à côté du 250ème anniversaire de la naissance de W.A. Mozart, on célèbre également le 400ème anniversaire de la naissance de Pierre Corneille, né dans une jolie maison à colombages, rue de la Pie à Rouen. L'occasion de faire un billet sur ce dramaturge qui, à l'image de Racine, tombe peu à peu dans les oubliettes des programmes scolaires.