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Carte postale suédoise: avril 2010

29 avril 2010

On ne prête qu'aux riches.

Clocher et cerisiers du Japon



Le week-end dernier, il s'agissait d'enterrer à Rouen la vie de garçon de mon plus vieil ami - nous nous connaissons depuis environ 25 ans -, ami dont je serai ainsi le témoin dans deux mois. A ce propos, il va toujours bien, il est d'ailleurs sans doute content que son compagnon de pataugeoire ait eu des problèmes de vessie natatoire puisqu'il a depuis la bouffe pour lui tout seul.

Enfin donc, joyeuses déambulations saturniennes et bruyantes dans les rues de la ville aux cent clochers, ambiance potache faite d'épreuves - pas nécessairement finaudes, vous vous en serez douté - concoctées par mes soins ainsi que ceux de son deuxième témoin.

Entre autres, il était chargé, sur la place de la cathédrale, de - tenter de - vendre des copies de dessins qu'il avait faits à l'âge de quatre ans [*]. Nous en avions imprimé une vingtaine, sachant que nous espérions qu'il parvienne à en vendre cinq. Sans exigence de prix minimal, tant et si bien que nous nous attendions à ce qu'il revienne avec cinquante centimes tout au plus.
Au bout de trente minutes, sous mes yeux ébahis, le petit sacripant avait écoulé non pas cinq mais vingt cartes, le tout pour 26.83€, réussissant à vendre un dessin à environ une personne sur deux qu'il abordait avec un grand sourire honteux, demandant cinq centimes et obtenant souvent trois euros.

Repensant aux pauvres gars sales ou parlant mal français qui tentent tant bien que mal de vendre Réverbère / leur air d'accordéon dans le métro / leur chômage dans un wagon de RER, et indépendamment du fait que mon ami et moi, avec nos têtes de premiers de la classe, on serait capables de vendre des lacets à un cul de jatte, j'ai dans l'idée qu'il y a peut-être quelque chose de sociologiquement intéressant qui s'est déroulé sous mes yeux.



[*] Il y avait notamment ce que nous avons identifié comme étant une girafe (verte), un chien blanc et rouge en laine collée sur du papier, et deux soleils violets qui se font des bisous.

22 avril 2010

Coloriages.


Carte du monde
2002

Par clics sur l'image, les pays que j'ai visités, année après année, le tout finissant par une projection sur les pays que j'ai envie de découvrir d'ici 2012.

J'aime constater que ma découverte du monde suit le sens trigonométrique. L'est et le nord, puis l'ouest, puis le sud. Mouvement sénestre involontaire, apparemment de plus en plus rapide.

Toujours est-il que cet envahissement de couleur, au-delà de son aspect conquérant un peu effrayant, en dit sans doute long sur ma trajectoire sociale, mais en dit peut-être finalement bien peu sur l'évolution de ma perception du monde.

21 avril 2010

To-read list.

To-read list

Le truc quand on sait que vous aimez un tant soit peu lire, c'est que l'on vous offre beaucoup de livres. Et forcément, lorsque vous n'avez pas le temps d'en consacrer suffisamment à la lecture, vous suscitez quelques frustrations lorsque l'on vous demande ce que vous en avez pensé.

Ah, vivement le transat et l'été qui va avec.

4 avril 2010

Danse macabre.

Qualité suédoise

En germaniste assidu, j'avais découvert Arthur Schnitzler en cours d'Allemand, à travers sa nouvelle Fräulein Else étudiée pour le bac (dix ans cette année, à propos). Très cynique sur la nature humaine, il décrivait l'univers viennois dans ses castes, ses milieux bourgeois empreints de vulgarité et d'une misère sociale et sexuelle qui contrebalançait des extérieurs pleins de frasques, à une époque - le début du siècle dernier - à laquelle la capitale autrichienne rayonnait sur le plan intellectuel.

La semaine dernière, au petit Théâtre de Poche Montparnasse [*], je suis allé voir La Ronde (Reigen, auf Deutsch), pièce de Schnitzler traduite et mise en scène par Marion Bierry, fille du directeur des lieux et habituée des premières dans ce théâtre minuscule.

Construite en dix scènes s'articulant autour de dix personnages - cinq hommes et cinq femmes, interprétés par sept acteurs -, la pièce fait place à l'ensemble de la société viennoise, pendant la grande guerre. Une prostituée, une femme du monde, un soldat, une actrice, un comte, un poète... A la manière d'un jeu de kyrielles, ils se rencontrent en duo tour à tour, charnellement (la prostituée avec le soldat, le soldat avec la femme de chambre, la femme de chambre avec le jeune premier... jusqu'à boucler la boucle avec le comte et la prostituée du début). Actrices et acteurs, souvent très dénudés, parlent de mort, d'envie, de regrets, de maladie (en l'occurrence la syphilis), d'hédonisme individuel, de suffisance. Jamais d'amour, jamais de trahison, jamais de duperies.

La pièce, en plus du texte original en fin de compte assez grave, est parsemée de chansonnettes très drôlement mises en scène (en allemand), chantées par les acteurs qui s'illustrent très joliment (on notera par exemple Heimat interprétée par le Comte - Vincent Heden). Des draps de lit qui volent, des acrobaties jambes en l'air, des scènes intimidantes de nudité tournées en dérision. Une certaine idée du théâtre polisson.

Mention spéciale à Eric Verdin qui, travesti dans un costume digne de l'affiche de Mucha représentant Sarah Bernhardt jouant Gismonda, incarne une actrice névrosée aux envolées lyriques tordantes. Et à Aline Salajan qui, au-delà de son jeu frais et haut en couleurs, est terriblement jolie.

Ah, et aussi, mention spéciale au vendeur du kiosque des théâtres de la Madeleine qui, lorsque je lui ai dit à travers l'hygiaphone "Deux places pour La Ronde, s'il vous plaît", m'a répondu "Pour Michèle Bernier ?". D'accord, il m'a avoué que ça faisait trois mois qu'il la sortait.

[*] Qui est un théâtre que j'adore, au passage, de par sa configuration et son choix de pièces éclectique toujours excellent.