free web stats
Carte postale suédoise: mai 2005

31 mai 2005

Embarquement vers l'est.

Sillage d'un bateau dans la mer baltique.

Vous me croyez si je vous dis que je n'ai jamais pris un ferry ? Il suffit que je sois ici pour l'expérimenter ! Petite traversée de la Baltique (Östersjön en suédois, littéralement "la mer de l'est") qui prend environ une nuit avec, je l'espère, de belles photos à la clé, notamment au niveau du retour dans l'archipel de Stockholm. Sans oublier une heure de décalage horaire avec l'Europe occidentale, ce qui promet un moment de panique comique lorsqu'il s'agira de revenir vers le bateau pour rentrer ("On part à quelle heure ? 18h ? Heure de Stockholm ou d'Helsinki ? Tu as mis ta montre à l'heure, toi, ou tu es toujours à l'ancienne heure ? Mais puisque je te dis que c'est une heure en plus, vu qu'on est plus à l'est ! Vad fan, dra åt helvete !(1)"). La croisière s'amuse. Le bonheur, quoi.

Alors pendant ces trois jours durant lesquels vous n'aurez plus à subir mes (mauvaises) humeurs et l'ennui profond que je vous procure, vous pouvez :

- Parier sur le fait que je ne tiendrai sans doute pas mes promesses, malgré toute ma bonne volonté.
- Aller jeter un coup d'oeil aux discussions faisant écho à la brève du Local et constater ainsi la forte différence existant entre l'opinion publique et le gouvernement en Suède. Je suis sûr que, le temps que je revienne, elles auront certainement bien dégénéré comme il faut.
- Regarder cette jolie parabole (flash) que j'ai découverte un peu trop tardivement (via Padawan).
- Constater que Nantes, outre avoir miraculeusement sauvé sa peau en L1, me plaît décidément énormément.
- Vous renseigner sur ce petit pays non scandinave (contrairement à ce que l'on entend souvent) qu'est la Finlande.
- Essayer de deviner combien de pilotes de Formule 1 et de rallye a engendré le pays du père Noël et de Nokia, pays de 5,2 millions d'habitants.
- Apprendre quelques rudiments de finnois, langue non indo-européenne qui a des points communs avec le hongrois mais aucun avec le sabir commun au danois, islandais, norvégien et suédois.
- Ou finalement, faire comme moi, tout oublier, regarder le coucher de soleil sur la mer et consulter le temps qu'il fait actuellement à Helsinki (Helsingfors en suédois).

A bientôt moussaillons, ne faites pas trop de bêtises, éteignez vos postes de télévision et prenez un bon bouquin, il n'y a que ça de vrai.

Et larguez les amarres, capitaine.


(1) Attention, langage vulgaire en sacrament.

Love, exciting and new,
Come aboard.
We're expecting you.
Love, life's sweetest reward.
Let it flow,
it floats back to you.

The Love Boat
soon will be making another run.
The Love Boat promises something for everyone.
Set a course for adventure,
Your mind on a new romance.

Love won't hurt anymore
It's an open smile on a friendly shore.

It's Looooove!
Welcome aboard - It's Looooove!

30 mai 2005

Analyse suédoise du "non" français au référendum sur le TCE.

On a souvent reproché à la Suède son manque d'implication dans l'Union européenne, que cela soit au niveau de son refus de l'Euro ou du faible sentiment européen régnant généralement chez ses habitants. Et c'est donc avec une certaine surprise que j'ai pu constater l'importance de la couverture que les médias ont faite du refus français du traité constitutionnel européen hier.

Je précise par ailleurs que l'image qui est donnée de ce résultat dans les médias est relativement en opposition avec l'avis général de la population qui, d'après les premiers échos que j'aie pu avoir, se réjouit plutôt de la victoire du "non", celle-ci ouvrant la porte à une série de déconvenues pour le TCE (la première ayant lieu mercredi prochain aux Pays-Bas).


Avant de rentrer dans les détails, une rapide mise en perspective des choses s'impose. La France a encore (pour combien de temps ?) un certain prestige politique en Suède. Un pays des Lumières porteur d'idéaux et important sur la scène internationale. Un pays qui, sous un certain angle, fait encore rêver.

Journal de SVT1. Image de La liberté guidant le peuple, de Delacroix, marquée d'un NON.
Ouverture du journal du matin de SVT1, première chaîne publique.

L'image de la France en Suède, c'est encore un peu cela. Le choix de La liberté guidant le peuple n'a pas été anodin pour illustrer ce sujet. Une France porteuse de valeurs, une France fondatrice qui devait montrer la voie de l'Europe. Et surmonté de ce "non" tricolore, il fait un peu mal, ce tableau, lorsque l'on connaît tous les symboles qu'il y a derrière. Il fait dire qu'après le 21 avril 2002, cette élection a rajouté une goutte au vase des élections françaises au goût amer. Un vase qui porte en lui un certain nombre de tentatives de renfermement sur soi qui ne sentent pas forcément bon. Passons.

Parmi tous les commentaires qui ont été faits suite à ce résultat, le mot qui revient le plus souvent est "incompréhension". Quelques commentaires cyniques (avec lesquels je suis d'accord) qui disent que la France n'a pas répondu à la question posée. Qu'elle s'est véritablement comportée comme un enfant gâté qui a transformé le sujet du référendum en un plébiscite franco-français contre le gouvernement.

Militante portant une pancarte

Car voilà. Peur du plombier polonais, du Turc (sic), des lendemains qui déchantent ou de la disparition des acquis sociaux. Une peur à juste titre qualifiée d'irrationnelle, rien dans le texte ne justifiant une telle crainte (si tant est que le texte ait été lu, j'ai de sérieux doutes à ce sujet). Une peur que certains journalistes ont qualifiée de "frilosité politique".

Quelques interviews de sorties d'urnes affligeants ("Monsieur, on peut savoir ce que vous avez voté ?" "La constitution, je ne l'ai pas reçue et je n'ai pas eu le temps d'en chercher un exemplaire à la mairie. Alors j'ai voté "non".") qui donnent une image parfois peu flatteuse des motivations électorales de certains.

Quelques réactions de politiques français.
J.M. Le Pen : "Sans le Front national le "non" ne peut pas gagner" - D. Strauss-Kahn : "Une mauvaise nouvelle pour l'UE" - J. Chirac : "La France s'est exprimée de manière démocratique" - M. Le Pen : "Ce soir nous avons assisté à une révolution des urnes"

L'impression globale qui se dégage ici est finalement que les Français nous ont fait un joli caca nerveux (vous me permettrez l'expression) qui plonge l'Europe dans une profonde incertitude (pour ne pas dire plus), avec un réveil qui prendra, à n'en pas douter, beaucoup de temps.

Un vote (souvent qualifié de "vote de protestation") franco-français pour emmerder Chirac et les ténors du "oui". Une certaine allégorie de la lutte des petits contre les puissants technocrates qui sont complètement déconnectés des réalités. Un vote égoïste qui met l'Europe dans une belle merde, en tout cas. Un vote égoïste qui se voit dans les journaux qui n'ont l'air de s'intéresser qu'au nom du successeur de Raffarin. La belle affaire. Car dans le reste de l'Europe, savoir qui de Sarkozy ou de De Villepin va récupérer le siège éjectable, on s'en contrefiche.

Finalement, c'est cela. Un vote de gamins qui ont voulu voir jusqu'où ils pouvaient aller. Ce qu'il fallait faire pour obtenir un gros remaniement ministériel.

Göran Persson et Fredrik Reinfeldt.
Göran Persson et Fredrik Reinfeldt.

Du côté de la Suède, le mot qui est revenu le plus souvent dans la bouche du premier ministre Göran Persson (sociaux-démocrates) est "Processen fortsätter" ("le processus continue"), bien qu'il ait trouvé que la décision des Français est "un grand pas en arrière pour l'Europe et ses perspectives de développement". Son futur adversaire Fredrik Reinfeldt (modérés) lors des élections de l'année prochaine est du même avis. En Suède, la ratification se fera au niveau parlementaire, ce qui n'enchante pas une population majoritairement contre le traité. Ce qui donne finalement une image quasiment identique à celle de la France : un parlement majoritairement pour et une population majoritairement contre.

Ce qui me désole le plus, c'est que c'est une image d'une France profondément divisée qui sort de ce résultat. Car si le résultat est net, les raisons du vote ne le sont pas. Quels sont les points communs entre le "non" communiste et le "non" frontiste ? Et quand je lis ces panneaux "Pour une autre Europe" alors je demande : quelle Europe ? Les partisans du "non" vont-ils s'unir pour bâtir un projet commun ?

Je le redis, j'ai n'ai finalement rien contre les vrais opposants à ce traité constitutionnel. J'en veux seulement à tous ces gens dont le vote a été irrationnel, dont les opinions ont été manipulées par des partis ou des associations qui ont proféré d'énormes mensonges. A tous ces gens je pose la question : c'est bien, vous avez gagné. Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?

Cela dit, merci, en tout cas. Mais la vengeance est un plat qui se mange froid.

Le jour où j'ai eu honte de mon pays.

Diverses coupures et unes de journaux suédois au lendemain de la victoire du Non au référendum sur le TCE.

28 mai 2005

Pense-bête pour la semaine prochaine.

Un ferry en partance pour la mer Baltique.

  • Ne pas oublier de répondre au questionnaire de Morgan (et lui dire par la même occasion que c'est, comme toujours, bien vu, calme et concis). Faire déjà une liste des livres que j'ai pu lire cette année (et ils ne sont pas nombreux, vous imaginez bien pourquoi, donc je vais un peu tricher et remonter le temps).
  • Écrire un billet à tête reposée sur le regard des Suédois sur le "non" des Français et faire d'une pierre deux coup en analysant les réactions "avant" et "après".
  • Revenir très rapidement sur le choix de la chanson de l'olympiade 2012 si elle a lieu à Paris.
  • Commencer à ranger quelques affaires car l'année se termine et le déménagement éclair approche.
  • Et enfin ne pas oublier de vous dire que mardi, je vais me changer les idées pour 3 jours en embarquant pour la Finlande.

Rage pro-européenne.

Coucher de soleil, quelques nuages.

(Attention, billet qui risque de faire grincer des dents)

Pas envie de m'énerver lors de la proclamation du résultat de dimanche. Même si j'y ai longtemps cru.

Mais j'ai tout de même mal au coeur de voir ces excités à la télévision en train de faire la fête devant les caméras de toute l'Europe parce qu'ils vont avoir la peau de Raffarin. Comme des gamins, vision franco-française du débat. Ne vous inquiétez pas, même si le oui l'emporte, Jean-Pierre fera ses valises vite fait, au soulagement de tous. Cela changera-t-il les choses ? Pas si sûr.
Mal au coeur de voir ces gens qui disent à qui veut bien l'entendre que rejeter le traité empêchera de nouvelles délocalisations. Ces gens qui mentent, qui détournent l'objet même du vote pour en faire un instrument de peur et d'incompréhension.
Assez de ces gens qui ne pratiquent que le vote de protestation. De ces votants de comptoir, de ces votants à la petite semaine qui décrédibilisent les gens pour qui le non est une vraie conviction argumentée. Ces gens que finalement je respecte.
Atterré de voir qu'un Président a cru bon de donner aux gens la possibilité de ratifier ou non un traité aussi complexe, nécessitant une connaissance poussée ou tout du moins une grille de lecture argumentée sur de nombreux points.
Dubitatif à la pensée même de l'argent nécessaire à l'organisation des campagnes, à l'impression des fasicules, parti en fumée en France et dans tous les autres pays européens. Ne pensons même pas à l'impact écologique d'une campagne qui aura donc lieu deux fois dans toute l'Europe.

Une défaite annoncée, alors. Et ma première grosse contrariété depuis que je suis ici, en voyant que ma procuration n'aura servi à rien.

Et de ressasser encore et encore que lors d'un référendum, on répond à la question. On ne répond pas à celui qui la pose.

Alors je ferai comme si de rien n'était à l'annonce des résultats. Enfin, on peut toujours croire aux miracles.

27 mai 2005

L'Europe, pour un oui ou pour un non.

Un triste week-end s'annonce. Un week-end de rancoeurs, de doutes et de querelles violentes et stériles. J'ai toujours été pour le oui. Forcément.  Et à l'heure où le non semble définitivement l'emporter, je me résigne un peu. Et je n'espère plus qu'une chose. Quel que soit le résultat, oui ou non, faites quelque chose de l'Europe.  Oubliez les querelles partisanes et tournez vous vers l'avenir. Et faites quelque chose.  Quelque chose de bien.

26 mai 2005

Les travers de la dissonance cognitive.

Un banc public vert en métal, ornements végétaux.
Kungsträdgården, Stockholm. Détail d'un banc public.

La réflexion menée ici me permet de me rendre compte que, sur un certain nombre de points concernant la Suède, je fais face à une jolie dissonance cognitive.

Je me permets de redonner la définition de ce terme encore méconnu (traduit de l'anglais d'un livre que je n'aurais vraiment pas dû acheter, Essentials of Organizational Behavior, de Stephen P. Robbins):
La dissonance cognitive a lieu lorsque des incompatibilités apparaissent entre au moins deux comportements chez une personne. La théorie de la dissonance cognitive suggère que les gens cherchent toujours à minimiser cette dissonance et l'inconfort qu'elle procure.
[...]
Imaginons qu'un directeur d'usine, M. Smith a la conviction qu'aucune entreprise ne devrait polluer l'air ou l'eau. Malheureusement, à cause des nécessités de son travail, M. Smith doit prendre des décisions qui mettent en opposition la rentabilité de son entreprise et ses convictions environnementales. Il sait que le rejet des eaux usées de son usine dans la rivière toute proche (nous imaginerons dans ce cas que la pratique est légale) constitue le meilleur choix économique pour son entreprise. Que va-t-il faire ? M. Smith fait clairement face à un gros problème de dissonance cognitive. À cause de l'importance des éléments qui constituent cet exemple, M. Smith ne peut raisonnablement pas ignorer cette inconsistance. Aux côtés de la démission, plusieurs choix s'offrent à M. Smith. Il peut réduire cette dissonance soit en changeant son attitude (arrêter de polluer la rivière), soit en concluant qu'une attitude dissonante n'est pas si problématique ("Il faut bien vivre et, en tant que décisionnaire, je dois souvent placer le bien de mon entreprise devant celui de l'environnement ou de la société"). Une troisième option serait de changer sa conviction ("Il n'y a rien de mal à polluer la rivière"). Un autre choix pourrait également être de chercher d'autres éléments consonants pour l'emporter sur les éléments dissonants ("Les bénéfices que la société tire de la fabrication de nos produits compensent largement le coût des conséquences de la pollution").


Vous pensez bien que je ne reviendrai pas sur la pensée nauséabonde sous-jacente véhiculée par cet exemple. Pour certains, la pollution semble se résumer à un unique problème économique. Passons.

Cela dit, il illustre bien la notion même de dissonance cognitive. Inconsistance entre des choses que l'on sait, des faits que l'on voit et des actions que l'on produit.

Je me souviens également d'un autre exemple très parlant (malheureusement je ne sais plus très bien où j'ai pu le lire): deux groupes d'étudiants devaient éduquer des rats (leur apprendre des tours, il me semble). Dans les deux cas, les rats étaient parfaitement identiques, mais on avait dit au premier groupe que ses rats étaient particulièrement doués et au deuxième que ses rats avaient des problèmes comportementaux. Et sans surprises, le premier groupe avait eu de bien meilleurs résultats que le deuxième, chacun des groupes ayant inconsciemment tendu à minimiser la dissonance cognitive qui existait entre "le potentiel" des rats et leurs résultats effectifs. Des rats soi-disant doués ne pouvaient se permettre de ne pas réussir à faire certains tours tandis qu'une certaine indulgence était de mise pour les rats soi-disant "inaptes". Un schéma qui, selon certains, se reproduit inconsciemment au niveau de l'éducation, entre les écoliers issus des quartiers "favorisés" et ceux issus des quartiers populaires. Bourdieu en parle un peu dans Les héritiers. Mais c'est un sujet un brûlant et je vois que je m'égare.

Donc, pour en revenir à ma pomme, je crois qu'il y a une certaine inconsistance entre ma perception d'un pays qui n'est pas tout blanc et ce que j'en décris ici, pour cause de conviction personnelle (ne pas taper sur un pays qui m'accueillit). Mais il paraît que tout un chacun tend à réduire cet écart, alors...

Nulle et non avenue.

Un immeuble vu sur le côté.
Stockholm, Skarpnäck. Immeuble en brique rouge, longs balcons en porte-à-faux soutenus par des haubans métalliques.

Il y a des années qu'il vaut mieux oublier. C'est à mon avis le cas de cette saison sportive qui s'achève. Relégation en CFA du FC Rouen (avec au passage un parcours remarquable : CFA en 2001/2002, National en 2002/2003, L2 en 2003/2004, National en 2004/2005 et donc CFA en 2005/2006). Relégation inéluctable et vente par l'homme aux idées saines du FCNA. Et, pour couronner le tout, hold-up du siècle hier soir de Liverpool face au Milan AC en finale de la Ligue des Champions. Voilà pour le football.

En ce qui concerne le rugby, mise à part une jolie finale européenne franco-française, je reste sur une mauvaise image du XV de France lors du dernier tournoi des 6 nations, ce qui n'augure rien de tellement bon pour la construction de la génération qui ira à la coupe du monde 2007.

Au niveau du hockey, défaite de la Suède en demi-finale des championnats du monde, ce qui empêche une soirée événementielle à Stockholm.

Et sans oublier l'élimination de la France lors des éliminatoires de la coupe du monde de football 2006.

Il y a des années, je vous jure... Ah mais oui, c'est vrai. Le sport, après tout...

25 mai 2005

Mise au point.

Le quai de la station. Un éclairage chromatique court le long des rails du métro.
Station Bagarmossen, ligne verte. Gert Marcus, 1994. Composition colorée, lumière au travers du verre.

Par courriel ou par commentaires, j'ai récemment essuyé quelques reproches quant à la vision sucrée que je donnais de la Suède (gentils reproches, quand même, n'allez pas croire que je me sois fait descendre en flèche).

Alors que l'on soit bien d'accord :
  • Ce carnet n'a jamais prétendu détenir la vérité. C'est un carnet de voyage, rien de plus. Son nom est d'ailleurs explicite à ce niveau. C'est une carte postale que l'on voudrait envoyer aux amis restés au pays. Un blog parmi tant d'autres, somme toute, et qui peut malheureusement se retrouver en tête de moteurs de recherche pour des requêtes concernant la Suède ou Stockholm (voilà ce que c'est que d'avoir un PR de 5).
  • Je n'ai jamais eu pour ambition de fournir des ressources de connaissances au niveau de la Suède. Je ne donne d'ailleurs jamais de chiffres ni ne relate de faits précis, je raconte seulement mes impressions et mes sensations, ce qui est loin d'être objectif. Pour vous informer au niveau de la Suède, je ne peux que vous donner les adresses de quelques journaux suédois (pour les torchons, c'est ici et ici). The Local offre également un très bon condensé de l'actualité suédoise en anglais et depuis peu partiellement en français, avec quelques thématiques de société qui donnent lieu à des discussions souvent intéressantes. Un certain nombre de sites personnels sont également très bien documentés, je vous laisse le soin de les trouver.
  • Je ne suis pas diplômé de sociologie et encore moins d'histoire ou de géographie. Alors, même si j'essaie d'écrire des billets correctement, je n'ai aucune "autorité" sur ce que je raconte, donc je peux effectivement dire des bêtises, beaucoup de bêtises (même si pour ce cas je ne pense pas en avoir dit, c'est seulement une question d'interprétation).
Depuis que je suis ici, je suis sur un nuage. J'ai attendu ce départ en Suède avec impatience, parfois cela n'a pas été facile, et ceux qui me suivent depuis le début le savent. Avant d'arriver ici, je n'avais jamais voyagé. J'avais seulement lu des livres, beaucoup de livres, c'est le sort qui est réservé à ceux qui n'ont pas les moyens de partir tous les ans aux Seychelles. Alors, ces deux ans passés à Stockholm, c'est un peu le bâton de maréchal qui marque la fin de mes études, comme une récompense. Et donc, contrairement à certaines personnes blasées qui étudient à Stockholm comme elles pourraient étudier à Pékin ou à Bogotá, je force un peu le trait. Je découvre toutes ces petites nouveautés qui font que, même si je suis resté en Europe, mon cadre de vie a été bouleversé. Être résident dans un pays étranger, c'est une sensation incroyable qui me donne constamment le sourire. Et qui me pousse alors à l'indulgence permanente envers la Suède, pays qui me donne une éducation gracieusement, pays qui m'accueille et me loge, pays qui me fait vivre des moments extraordinaires.

Alors effectivement sur ce carnet je suis un peu plus bisounours que redresseur de torts. Ceux qui me connaissent pourront constater que, "dans la vraie vie", c'est franchement le contraire. Mais rassurez-vous, vous avez échappé à cela.

Sans rancune, hein.

24 mai 2005

Clivages.

Photos des différents participants au jeu.

Par principe, j'ai toujours aimé les choses qui bousculent l'ordre établi. Qui vont à l'encontre de l'impression dominante. Parce qu'elles font voler en éclats ces schémas simplistes qui tronquent nos visions.

Chaque semaine, SVT2 diffuse une émission de la BBC mettant en scène des hommes et des femmes voulant devenir chanteurs lyriques. Une Star Ac' version musique classique, finalement, mais sans les caméras omniprésentes, celles-ci se limitant à filmer les répétitions, les cours de chant et les représentations.

Une bonne émission qui n'a donc pas grand chose en commun avec ces abrutissantes émissions de télé-réalité, si ce n'est le principe des éliminations successives de candidats.

Grâce aux leçons de chant, on peut très bien apprécier le travail lyrique des candidats, leurs difficultés à vraiment "jouer" un personnage d'opéra en allant au-delà de la simple chose musicale. De sacrées voix par ailleurs, qui n'ont pas grand chose à envier aux étoiles actuelles du chant. Il suffit de voir l'interprétation de la mort du commandeur rongé par les flammes de l'enfer dans Don Giovanni ou celle de Carmen avec "Les tringles des sistres tintaient" pour s'en rendre compte.

Si j'ai bien aimé cette émission, c'est parce qu'elle met en scène des gens normaux. Ils ne répondent pas à un profil. Ils ont une voix, c'est tout. Ils sont petits ou grands. Elle est caissière de supermarché, il est livreur, elle est aveugle, il est étudiant, elle est directrice des ressources humaines, il est noir. Et ils battent en brèche ces stéréotypes éculés qui voudraient que la musique classique soit l'apanage des classes aisées, des gens bien comme il faut.

Ils nous ressemblent, ils ne semblent pas être passés par un casting recherchant des "personnages". J'ose espérer que ces personnes sont bien réelles. Si tel est le cas, chapeau bas.

Une certaine leçon d'humilité qui nous sort des lambris dorés dans lesquels est généralement confinée la musique classique. En tout cas, ils étaient beaux, ces gens. Modestes et amoureux de la musique. Pleins d'envie. Naturels. Des gens bien. Pas comme il faut.

23 mai 2005

L'arme de la non-violence.


Stockholm - Non violence, Carl Fredrik Reuterswärd, station de métro Åkeshov, ligne verte. Exemplaire en modèle réduit.

Parmi les valeurs qui ont sans doute été développées (ou tout du moins influencées) par le Lagom se trouve celle de la non-violence. Une valeur très inscrite dans les mentalités suédoises.

Il suffit pour cela de regarder dans les rayons des magasins de jouets. Très rares y sont les pistolets à fléchettes. On privilégie plutôt les jeux manuels. Comme si l'on voulait empêcher l'instinct violent de se développer chez les jeunes enfants. Pourtant, bien des sports a priori violents sont populaires dans ce pays, que ce soit le hockey ou la lutte. Mais tout se passe sur un terrain de sport, avec des règles bien établies.

Une société qui privilégie le consensus plutôt que l'affrontement, également. La quasi-absence de machisme y est sans doute aussi pour quelque chose. Un rejet systématique de toute forme de violence, donc. Et une sculpture qui a fait le tour du monde.


Ce billet inaugure une future série sur l'art dans le métro de Stockholm. "La plus longue galerie d'art contemporain du monde", entend-on souvent.

20 mai 2005

Une cote d'amour qui ne tient qu'à...

L'ambassade de France à Stockholm.

Avant-hier, je parlais de restaurants avec une amie (vous admettrez que l'on reconnaît bien là le Français moyen). Elle me demande quel type de nourriture est populaire en France. Je lui dis que, comme un peu partout dans le monde, les restaurants chinois, japonais ou italiens remportent un certain succès, avec un peu derrière les bars à tapas ou les restaurants moyen-orientaux.

Elle me dit qu'à Stockholm, les restaurants francais étaient les plus populaires jusqu'à un certain moment puis qu'ils ont été boudés pendant quelques années.

Intrigué, je m'interroge sur les raisons de cela. Avons-nous eu un contentieux avec la Suède qui mériterait un boycott tel qu'il a été pratiqué outre-atlantique ? A première vue, non. Alors je demande les raisons.

Un mot, une date. Mururoa. 1995. J'avais 13 ans à l'époque. Un événement que j'avais presque oublié.

19 mai 2005

Grön och blå.

Quelques photos du bras de lac Mälar qui monte jusqu'à Solna et Sundbyberg.

Evidemment, depuis mon arrivée ici, bien des choses ont changé. Dans ma vision des choses, dans mes perceptions, dans ma manière d'aborder la vie... Par petites touches qui se sont insidieusement immiscées. Mais s'il y a une chose qui a radicalement changé chez moi, c'est mon rapport à la nature.

J'ai toujours eu un petit faible pour la défense de l'environnement en général. Je fais très attention à ce que je fais, à la manière dont je trie mes déchets, à l'utilisation des ressources énergétiques (combien d'étudiants vois-je entrer dans une salle de classe, fermer les rideaux et allumer la lumière, combien de fois vois-je des magasins avec les portes grandes ouvertes en plein hiver alors que le chauffage est au plus fort, combien de personnes utilisent la climatisation avec une fenêtre ouverte...). Cependant, mon rapport à la terre elle-même s'arrêtait là, paradoxalement. Lorsque j'avais le choix entre une après-midi passée à jouer aux jeux vidéos (ou à lire un livre, cela m'arrive parfois également !) ou une après-midi à la campagne, je choisissais bien souvent la première option.

Depuis que je suis ici, c'est radicalement différent. Il faut dire que la nature saute à la gorge, même dans la capitale. Du vert, du vert, et encore du vert. Du bleu de l'eau, aussi. Des bruits d'oiseaux qui empêchent presque de dormir la nuit.

Alors, plutôt que de passer le temps sur ordinateur qui ne me dit plus rien, je pars. Courir, souvent. Prendre des photos aussi. C'est très photogénique, la nature. J'inspire à pleins poumons un air désespérément pur. J'en viens à le regretter lorsque je reviens en France, mes yeux sont rapidement irrités et ma gorge est bien souvent mal en point. Alors voilà, mes goûts ont changé.

On grandit, aussi.


Vous m'excuserez par avance de la taille gargantuesque de cette image, mais depuis que j'ai un nouveau joujou...

Rattrapper le temps perdu.

Le ciel actuel de Stockholm la nuit. Pas de noir, un bleu profond et une lueur rouge à l'horizon.

Il me fallait évidemment une photographie pour illustrer ce retour de la lumière. Maintenant que je suis à nouveau équipé, je peux accompagner ce billet sirupeux.

Au plus fort de la nuit, à 1 heure du matin. Les oiseaux chantent encore (déjà ?), le soleil commence à revenir. On voit sans l'éclairage public, on ne veut plus dormir.

En un mot, le bonheur.

18 mai 2005

De nouveaux yeux.

Une fleur qui ressemble au lilas mais qui n'en est pas.

Suis le jour, à la recherche du soleil...

16 mai 2005

Heureux.

J'en ai parlé souvent sur ce carnet, du manque de lumière de l'hiver. J'avais souvent répété que, finalement, c'était ce dont j'avais le plus souffert, loin devant les températures un peu fraîches. Ne pas voir le soleil et devoir se contenter de sa faible lumière derrière les nuages seulement 5 heures par jour, j'avoue que cela a été plus difficile que prévu.

Maintenant, tout est différent. Le ciel n'est vraiment noir qu'aux alentours de 23h00. Un noir qu'il perd très vite, vers 2h20. Le soleil ne descend en effet que très peu sous l'horizon, donc la nuit n'est plus tout à fait noire. Alors, lorsque l'on se réveille dans la nuit et que l'on regarde par la fenêtre, on n'est plus très sûr de l'heure qu'il est. 4 heures ? 9 heures ? Aucune différence. Même chose le soir. Les discussions s'éternisent, on traîne dans la rue. Sensation étrange lorsqu'il fait grand jour et que l'on est seul dans la rue, sans voitures ni piétons car il est très tard. On croit que la ville nous appartient, on entend seulement les oiseaux qui n'en finissent plus de chanter.


Rien à voir mais depuis deux heures j'ai un nouvel appartement dans Stockholm intra-muros (enfin !), le contrat restant à signer ce jeudi. Quelques sueurs froides et coups de coudes, j'ai bien cru à un moment que le 15 juin je dormirais sous les ponts. Le compteur monte donc encore d'un cran. En deux ans et demi, j'aurai déménagé six fois, donc trois fois tout seul et sans voiture. Comme quoi, on peut en faire des choses sans voiture et avec le métro...

12 mai 2005

Bulles et chaos.

Depuis environ une semaine, la fontaine qui se trouve entre mon immeuble et la station de métro a été remise en route, le gel étant définitivement éloigné. Elle n'est pas jolie, cette fontaine surmontée d'une statue des années 30 représentant une allégorie de la fertilité et de la famille modèle. Mais cela met tout de même un peu de gaîté dans cette rue que la circulation automobile a rendue bien terne.

Seulement voilà. Il y a deux jours, quelqu'un a versé dans la fontaine quelques gouttes de lessive. Et de gros nuages de mousse ont fait leur apparition à la surface de l'eau, rendant cette fontaine tout à coup beaucoup moins jolie. Quantité impressionnante de bulles et de mousse qui déborde du bassin et s'en va se répandre sur le trottoir et sur la route, ce qui pourrait éventuellement générer un accident (chute d'une personne ou accident de voiture).

En voyant cette situation, je me suis souvenu d'une question mathématique bien connue (oui, je vois énormément de situations de la vie de tous les jours sous forme mathématique, c'est grave ?), celle du chaos.

Dans ce cas, à cause d'une simple goutte de liquide ou de quelques grammes de poudre, une fontaine au comportement stable (débit constant, niveau de l'eau maîtrisé) s'est transformée en un système chaotique : formation de bulles, dépassement du niveau, eau savonneuse répandue sur la chaussée... En allant un peu plus loin, on pourrait tout imaginer. Un accident de la route impliquant un personnage politique très important. Une guerre atomique qui éclate suite à sa mort... Une simple goutte de savon a eu des conséquences dévastatrices. Comme le célèbre battement d'ailes du papillon.

Il est assez difficile de déterminer si un système a des propensions chaotiques ou non. Si, d'un comportement stable, il peut passer, à cause d'un événement minime, à un comportement imprévisible.

Prenons un autre exemple. Imaginons un billard classique. J'ai dessiné (très mal et très rapidement) deux coups qui ne diffèrent que d'un angle minime. Après trois rebonds, les boules se trouvent pratiquement au même endroit et ont suivi des trajectoires relativement semblables (différence "proportionnelle" à la différence survenue au départ, somme toute). Imaginons maintenant un billard qui a un côté rond. On peut voir maintenant que, du fait du rebond sur une paroi circulaire, les trajectoires diffèrent énormément et les boules n'arrivent finalement pas du tout au même endroit.

Deux vues de billards. Celui qui a un côté rond présente les caractéristiques d'un système chaotique.

Le deuxième billard présente donc les caractéristiques d'un système chaotique.

La conception et l'ingénierie tournent souvent autour de ce problème. Concevoir un système et éviter qu'il ne devienne chaotique. Compliqué.


Oui, j'aime écrire des billets sur les mathématiques visuelles. Quelques soubresauts de prépa, sans doute. Parce que j'en suis maintenant bien loin.

10 mai 2005

Chiffres.

Un reportage instructif lors du journal télévisé de SVT1, hier soir, sur les produits surgelés. Plats complets à mettre directement dans le four micro-ondes dont le marché est, sans surprises peut-être, moins développé en Suède qu'en France (plusieurs causes dont sans doute le moindre nombre de célibataires, etc.).

La journaliste y détaille le contenu de certains produits, prenant l'exemple d'un wok au poulet et aux légumes pimentés d'une marque bien connue. Un poulet qui vient de Thaïlande (oui, vous avez bien lu) car moins cher, une partie des légumes qui vient de Turquie et d'Espagne, des condiments qui viennent de Colombie et d'Italie, quelques rares composants qui viennent de Suède.

En tout, 37 000 kilomètres ont été parcourus pour confectionner ce produit.

Tout d'un coup, le wok que l'on aurait bien acheté pour dépanner un soir, on le regarde d'un autre oeil. Et on le laisse dans le bac.

9 mai 2005

He's electric.

... He's in a family full of eccentrics (titre relativement navrant au vu de ce que j'avais écrit ici... Mais je le garde tout de même, pouf pouf.).

Depuis un mois et le retour des beaux jours, je suis sujet à un phénomène relativement étrange : une majorité des objets que je touche m'envoie immédiatement une décharge électrique qui me fait sursauter. Parfois violente, parfois anodine. Je connaissais déjà ce phénomène en France lorsque le temps était très sec, avec quelques objets particuliers comme les pulls en laine (avec les petits crépitements adéquats) ou la brosse à cheveux (très drôle lorsqu'on l'approche des cheveux et que ceux-ci se redressent instantanément, rendant le coup de peigne pratiquement impossible).

Mais ici, cela a pris des proportions tout autres. Le manche de la poêle sur sa plaque de cuisson qui m'envoie une décharge qui pousse ma main en arrière, le drap que je sors du sèche-linge, mon clavier d'ordinateur lorsque je ne l'ai pas touché depuis un peu de temps, les poignées de portes... Tout est bon. Le temps est pourtant parfois humide. Un élément m'échappe, en tout cas.

Je devrais me mettre sur le toit de l'immeuble, j'attirerais peut-être la foudre. Ou alors je ferai office d'antenne de télévision.

Kriget.

Après le 11 novembre dernier, le 8 mai est la deuxième commémoration que je n'ai pas célébrée ici. Les journaux en parlent tout de même un peu. Mais la guerre est, d'une manière générale, peu ancrée dans les esprits. J'ai d'ailleurs eu peu de discussions à ce niveau avec des Suédois.

Sans tellement de surprises, c'est auprès des Finlandais (dont la communauté est très nombreuse à Stockholm) que j'ai pu trouver le plus de points communs concernant le rapport à la guerre. Un pays qui a, lui aussi vécu le conflit, que ce soit d'un côté comme de l'autre (tout d'abord en luttant contre les Soviétiques à l'Est avec le soutien de l'Allemagne puis en luttant contre les Allemands en Laponie).

Il y a ce Finlandais qui me dit que sa grand-mère continue à lui parler de la guerre et qu'il ne doit pas oublier. Et qu'il ne comprend pas comment certains Suédois ont pu soutenir l'invasion en Irak. Il y a cette ancienne habitante d'Helsinki qui me confie que la Russie lui fait encore peur.

Il y a ce Suédois qui critique un peu la neutralité, en me disant qu'elle n'entraîne pas une position claire quant à la guerre.

Enfin il y a moi qui suis né en Normandie, dans une région meurtrie par la guerre. Qui ai parcouru des centaines de fois des rues ternes reconstruites dans l'urgence dans les années 50. Qui ai entendu ces histoires de personnes mortes dans les caves lors des bombardements. Vu ces photographies de soldats allemands carbonisés dans des camions encore fumants. Ou foulé la plage d'Omaha la sanglante, dont le sable porte en lui des traces que l'on ne voit pas ailleurs.

Alors, face à ces quelques personnes dont le pays n'a pas souffert de la guerre et qui se disent que parfois, une guerre, "pourquoi pas", je ne sais que dire. Je me dis seulement que le souvenir, c'est peut-être ce qu'il y a de plus efficace contre les atrocités. Même si je ne les ai pas connues. Mais j'en ai vu les séquelles et je les vois toujours.

4 mai 2005

Cours sommaire de flûte traversière.

Photo de ma flûte traversière, à Nantes, il y a bientôt un an.(ne vous méprenez pas pour la photo, je l'avais prise il y a bientôt un an)

Hier, un(e) internaute est arrivé(e) sur ce carnet en ayant tapé la requête "flûte traversière comment souffler".

Pas de nouvelle leçon sur le fait qu'à mon avis 60% des personnes utilisant des moteurs de recherche ne connaissent pas la façon dont ils fonctionnent. Le web sémantique, ce n'est pas encore pour aujourd'hui, malgré l'apparition d'un outil lexical hasardeux sur Google par exemple et de quelques tentatives de sémantisation des requêtes (par exemple). Ask Jeeves est parfois clairvoyant, sans toutefois faire de miracles la plupart du temps.

Donc, je vais répondre à la question, puisque finalement la magie des affluents fait que je connais la réponse (lui aussi, étonnamment).

Tout d'abord, il faut un peu de temps avant de maîtriser la bête. Je me rappelle avoir fait souffrir mon entourage pendant un certain temps. Par contre, une fois que le coup est pris, c'est comme le vélo, on ne l'oublie pas.

Au début, le mieux est de s'entraîner avec l'embouchure seule, sans le corps ni la patte d'ut, face à une glace. La flûte doit être légèrement penchée vers le bas, mais sans plus. Le trou de l'embouchure doit être maintenu horizontal, surtout pas tourné vers la bouche. Le haut du menton est collé contre l'instrument, contrairement aux lèvres. Celles-ci se positionnent indépendamment l'une de l'autre de manière à souffler vers le bas.

Le flûtiste doit toujours sourire un peu lorsqu'il joue, surtout dans les aigus. Cela permet à l'air d'être contenu et de ne pas s'éparpiller sur les côtés. C'est également très important pour garder un débit correct et maîtrisé.

Mais conseils s'arrêtent là, car tout vient avec l'expérience, que ce soit au niveau de la quantité d'air à produire pour sortir une note (on souffle plus fort lorsque la note est aiguë, évidemment) ou au niveau de l'inclinaison de l'instrument qui peut varier dans certains cas. Ce petit film (.mov) est cependant très instructif à ce niveau. Néanmoins, c'est tout de même une bien curieuse idée que de vouloir apprendre à souffler dans une flûte traversière sur Internet au hasard des moteurs de recherche.

Et si finalement, la vraie réponse au web sémantique c'était cela ? La magie des affluents en mots-clés...

2 mai 2005

God natt.

Les températures remontent et les fenêtres s'ouvrent. Ouvrir une fenêtre, un geste que j'ai toujours aimé.

Tard le soir, de retour de soirée. Douce chaleur de la nuit, besoin de silence, d'immobilisme. Assis au bureau, face à la fenêtre, vue dégagée. Et la fenêtre s'ouvre.

Les bruits de la ville, la nuit. Des ronronnements de voitures qui roulent sur les pavés. Quelques cris, au loin. Le son des conversations de la rue qui monte le long des façades. Une petite musique qui sort de mon ordinateur portable. Musique du soir, souvent peu de paroles. Des rythmes lents, électroniques, volume minimal. On entend parfois davantange le ventilateur que la musique.

Pas de lumière pour éviter les moustiques. Seulement celle de l'écran qui donne à la pièce un teint blafard. Vue vers le nord, la nuit. Quelques lumières allumées, de-ci, de-là. Le silence omniprésent a réveillé l'écoute. L'oreille est à l'affût du moindre bruit. Le chat de la voisine qui a également ouvert sa fenêtre. L'eau qui coule dans les canalisations.

Des soirs comme j'en avais vécu à Nantes l'été dernier. Des moments rares de solitude, très tard le soir, après avoir quitté les amis. Joli.

1 mai 2005

Muguet nantais.

S'il y a une odeur qui me manque aujourd'hui, c'est celle du muguet. Cette petite fleur de la région nantaise dont je sentais le parfum partout dans les rues lorsque j'habitais encore la cité des ducs. Un parfum unique qui monte à la tête et enivre.

Le jour où Internet transmettra les odeurs...

Pimp my life.

Parmi toutes les chaînes que j'ai la chance de recevoir dans mon immeuble, il y a MTV, la grande chaîne culturelle américaine. N'ayant jamais eu l'occasion de la regarder en France, je savoure ici ce plaisir incommensurable. Des programmes décérébrés à foison, de Dirty Sanchez à Jackass, des clips de R'n'B où il fo étre djeun pOur coNpRenDr pk on fé le concour du + peti string à longueur de temps, des interviews exclusives de Bono qui nous explique comment il va sauver la planète...

Et parmi tout cela, il y a une émission qui a particulièrement retenu mon attention : Pimp my ride. Le principe est simple : Xzibit, le rappeur sympa, va aller voir un petit jeune qui a une épave en guise de voiture. Le jeune il aimerait bien que sa voiture soit revue de A à Z car il est la risée de son quartier. Il faut dire que les portières qui se détachent et les sièges en moumoutte éventrée, cela ne fait pas très sérieux. Xzibit lui prend donc sa voiture et l'emmène chez ses potes garagistes spécialisés dans le tuning. Et là, c'est la métamorphose complète. Nouvelle peinture, jantes larges, écrans LCD partout au plafond, autoradio MP3. Tout est bon. Sauf que toute la partie mécanique reste la même, alors j'ai des doutes quant à l'impact réel de ce rhabillage. Mais là n'est pas la question. Maintenant, la voiture, elle claque.

Quand le petit jeune revient, il ne sait pas ce qu'est devenu son tas de ferraille. Alors quand le rideau se lève et laisse apparaître la bête, il crie, à grand coups de "Oh, my God!" ou de "Holly shit". Cris, pleurs, embrassades. Lorsqu'il retourne chez lui avec son fier destrier, le petit jeune roule des mécaniques, ses parents tombent sur les genoux, sa copine est fière et le caquet des amis qui le raillaient avant est rabattu.

Elle révèle un certain nombre de choses, cette émission. Des jeunes qui se construisent une vie à partir de morceaux de métal montés sur roues. Des jeunes qui ont l'impression qu'ils n'existent pas s'ils n'ont pas une voiture qui provoque l'admiration des amis. Cette façon incroyable qu'a eu la voiture d'être un instrument de pression sociale.

Oui, c'est peut-être sociologique, finalement, MTV.

Valborg, évidemment.

La Suède est très friande de ce genre d'événements. Ces grandes fêtes populaires qui rassemblent les gens, toutes générations confondues. Au pays des réseaux sans fil et de l'Internet tout puissant, cela rassure, en un sens. Les personnes âgées en remontrent aux plus jeunes qui ne jurent que par l'ordinateur. Les petits blondinets sont contents d'aller avec papy et mamy acheter des bonbons et autres roulés à la cannelle.

C'est une très jolie fête. Très certainement le plus bel événement que j'aie pu vivre ici, aux côtés de la Sankta Lucia, le 13 décembre dernier. Valborg, c'est la fin officielle de l'hiver. C'est également la journée des étudiants. Alors on descend dans la rue, et on y trouve de tout. Des étudiants, donc, défilant dans des chars avec leur casquette traditionnelle. Quelques aînés qui veulent retrouver leurs sensations de jeunesse ont ressorti les leurs, même si elles ont quelque peu jauni. Qu'importe. Uppsala, la ville étudiante par excellence, est méconnaissable. Sa population a triplé, les services municipaux ont ressorti les chasse-neige pour dégager les milliers de bouteilles et canettes qui jonchent le sol. Ambiance survoltée mais bon enfant. Milliers de personnes qui déjeunent sur les pelouses, malgré la pluie. Quelques ressemblances avec les images de Woodstock.

On met les petits plats dans les grands. Le vieux tramway de Stockholm a fait son apparition. On le sort seulement une fois dans l'année, un peu comme la bouteille de digestif du grand-père. Il est toujours fringant malgré les ans. Il sent le vernis, abondamment étalé pour le préserver des avaries du temps. Il grince et n'est pas confortable. On y est tassé, on sent le conducteur un peu anxieux à l'idée de traverser la ville dans cet engin des années quarante dont les freins n'ont pas l'air très vaillants. Mais les gens s'y sentent heureux car c'est jour de fête.

Petits et grands sont rassemblés autour du feu traditionnel à Skansen, le grand parc de la ville. Un feu symbolique pour mettre fin à l'hiver et tout recommencer. Jolis chants. Pas de religion, seulement une grande fête populaire. Des jeux d'équipe ou des concours d'habileté. Des discussions entre amis qui se prolongent tard dans la soirée malgré le froid encore présent. Des moments précieux comme il en manque un peu aujourd'hui, à l'heure où tout le monde se tourne vers son écran pour communiquer avec le monde.

Si je n'ai qu'un mot à retenir de la journée d'hier, c'est évidemment "partage".